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28. novembre 2017

Nos lacs sont-ils au bord de l'asphyxie?

Afin de mieux comprendre comment un lac respire, des chercheurs de l’EPFL ont effectué le bilan de consommation d’oxygène dans les profondeurs du Léman, ce qui ne s’était jamais fait auparavant. Ils ont ainsi recueilli des informations essentielles à la compréhension écologique et au développement futur de son écosystème.

En automne les lacs subissent leur grand brassage annuel. Ce phénomène qui se produit grâce à l’action des vents, à l’apport des rivières affluentes et au rééquilibrage des températures, va réoxygéner leurs eaux profondes. En effet, pendant la période hivernale les eaux de surfaces riches en oxygène se refroidissent et s'enfoncent et se mélangent avec les couches plus profondes . Mais avec ses 310 mètres de profondeur le lac Léman, par exemple, n’est brassé que partiellement. Il ne connaît «une grande respiration» que tous les 8 ans environ. Si l’oxygène venait à manquer durablement, cela détruirait la faune et la flore qui vivent dans ses abysses.

Pour mieux comprendre comment les lacs respirent, Robert Schwefel du Laboratoire de physique des systèmes aquatiques a sondé les profondeurs du lac Léman afin d’effectuer le bilan de son oxygénation. Il a prélevé des échantillons à différentes strates avec un robot capable de descendre à plusieurs centaines de mètres. Grâce à des microsondes, il a mesuré la concentration d’oxygène micromètre par micromètre, dans l’eau et les sédiments. Les échantillons prélevés à sept emplacements du lac, n’ont pas été vains: «Cela nous a permis d'obtenir des ensembles de données uniques pour estimer la consommation d'oxygène dans les sédiments, ça n’avait jamais été mesuré auparavant in situ».

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Depuis le milieu du siècle dernier, l’activité humaine - la pression anthropique - a provoqué une eutrophisation - un cumul de nutriments dans les eaux faisant proliférer les algues - ainsi que l’élévation des températures, déséquilibrant l’écosystème lacustre. Il était facile, hier, de déverser déchets et produits toxiques dans le «tout-à-l’égout», pensant que le lac pouvait s’auto nettoyer. Grâce à une prise de conscience collective et à des mesures mises en place dès les années 60 - amélioration de l’épuration des eaux usées ou interdiction des phosphates dans les lessives en 1985 – la propreté de l’eau des lacs suisses s’est nettement améliorée. Mais, malgré tous ces efforts, ceux-ci souffrent toujours d’un manque d’oxygène.

En eaux profondes, toutes les algues produites depuis un demi-siècle ont créé une immense quantité de matière organique qui compose les sédiments. Les bactéries qui se chargent du processus de dégradation consomment beaucoup d’oxygène. «Ce n’est pas parcequ’on a diminué les phosphates issus de l’agriculture ou de l’industrie que tout est rentré dans l’ordre. Il faudra encore du temps avant que les lacs ne retrouvent leur respiration optimale», précise Damien Bouffard qui a participé à la recherche.

En mesurant très finement la concentration d’oxygène, dans toute la colonne d’eau jusque dans les sédiments, les chercheurs ont découvert et expliqué conceptuellement comment celui-ci y est consommé. La contribution des sédiments est évaluée à 30% de la consommation totale d’oxygène. Cette étude a également mis en évidence et modélisé simplement la variation de consommation d’oxygène en fonction de la profondeur. Celle-ci dépend en grande partie de la morphométrie du lac et de la diminution du taux de minéralisation de la matière organique dans la colonne d’eau.

Ces données micrométriques leur ont permis de modéliser, à grande échelle, la dynamique de l’oxygène dans le lac et grâce à la connaissance des flux, de développer un outil de prédiction. Même si les scientifiques espèrent que la consommation d’oxygène baissera progressivement dans les sédiments, les changements climatiques perturberont toujours plus les brassages des lacs. Il faut donc poursuivre les recherches.

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